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Un charmant road trip en Afghanistan.

  • Photo du rédacteur: Marine
    Marine
  • 23 déc. 2024
  • 4 min de lecture

En Afghanistan, en 2002, juste après l'intervention américaine, alors que les médias du monde entier se concentrent à Kaboul, trois jeunes reporters montent dans une voiture dans un road trip insensé à la rencontre du peuple afghan. Serge Michel, un journaliste moraliste et bourreau de travail, Paolo Wood, un photographe aussi jovial que inconscient, et Claude Baechtold, un photographe et journaliste suisse froussard qui s'improvise cinéaste. Ce documentaire aussi drôle que touchant n’aurait pu jamais voir le jour, puisque les rushs ont été égarés par le réalisateur dès son retour en Suisse, puis heureusement retrouvés après 20 ans, au cours d’un déménagement. 


Claude Baechtold dans Riverboom (2024).
Claude Baechtold dans Riverboom (2024).

Le documentaire fut sélectionné et présenté lors de nombreux festivals, tels que le Festival Premiers plans d'Angers où il remporte le Prix du public, mais aussi lors du Festival FIPADOC où il remporte le Prix Mitrani. De plus, il s'agit d’un coup de cœur personnel. J’ai eu la chance de découvrir Riverboom lors du Festival de la Rochelle en juillet 2024, grâce au dispositif étudiant.es au cinéma de l’AFCAE. Nous avons toutes eu un énorme coup de cœur pour ce documentaire et avons décidé de l’accompagner lors de séances spéciales dans nos salles respectives (dans mon cas, au Méliès de Montreuil dont je suis l'ambassadrice), lors de sa sortie en salle le 25 septembre 2024. J’ai ainsi rencontré le réalisateur et présenté la séance au Méliès. 


Durant une heure et demie (95 min), trois hommes, Claude, Paolo et Serge nous emportent à travers le désert Afghan. On se retrouve entassé dans une petite voiture rouge, dans un champ de cannabis ou autour d’une table avec des talibans. Le documentaire s’appuie sur la légèreté de la narration en voix-off de Claude Baechtold, qui nous explique tantôt de manière ludique tantôt de manière humoristique le contexte du pays et les étapes de leurs voyages. La narration défile sur un fond d’images filmées ou photographiées à l’aide d’une caméra achetée à l’improviste dans un bazar de Kaboul, et d’un petit appareil photo argentique. Il ne réalisera pas moins de 10 000 clichés, prises à l’aide de deux caméras grand public ainsi que des pellicules locales. Avec son montage accéléré, le film ressemble à un vlog de vacances que l’on pourrait retrouver sur des plateformes en lignes telles que youtube. Sauf qu’il faudrait être inconscient.e pour prendre des vacances sous le soleil d'Afghanistan un an pile après les attentats du 11 septembre 2011. 


Pourtant, cela n’a pas empêché Claude, je cite “le cameraman qui tremble de peur sous sa pashmina”, Serge “le photographe avec les grandes dents”, et Serge, “le journaliste qui a mauvaise conscience”, de filmer en plan rapproché certains des plus dangereux chefs Talibans du pays, parfois même sans se rendre compte de leur identité. Les trois reporters peuvent ainsi participer au record du nombre de fois qu’un être humain à échappé de justesse, à une mort certaine. 


Des routes droites qui filent à travers le désert, des voitures criblées d’impacts de balles, un vieil homme assis sur une chenille de tank, un champ de culture de cannabis… Le film présente un visuel coloré provenant d’images d’archives ou filmées par Claude, qui contraste avec les photographies en noir et blanc de Paolo, qui elles donnent un ton plus dramatique, plus sérieux, voire tragique à l’image, et nous emporte à travers les paysages d’un pays encore sous le choc et soignant ses blessures de guerre. 


La voix off de Claude narre leur voyage à la première personne, ponctuant son récit de flashbacks, de blagues ou d’anecdotes… Ce type de documentaire à la première personne nous entraîne dans l’intimité de celui qui raconte et installe une proximité avec les spectateur.ices. Pour le réalisateur, Claude Baechtold, ce voyage s'apparente à une sorte de rite initiatique, qui fait que ce documentaire relève parfois de la fiction. En effet, on accompagne Claude à travers le deuil de ses parents morts dans un accident de voiture quelques années auparavant. On s’éloigne presque de l’aspect documentaire lorsque les trois journalistes arrivent à la rivière Riverboom, qui donnera son nom au film par la suite. En effet, la rivière est dans un tel état de crue qu’il est impossible pour quiconque de la traverser. Les trois hommes sont donc contraints de passer la nuit sur la berge dans leur voiture, en attendant la décrue du lendemain. Durant cette nuit, ils feront face à la mort plusieurs fois, un bandit venant frapper à leur fenêtre et hésitant à les tuer puis jeter leur corps à l’eau, puis un violent orage qui éclate… Claude nous raconte en détail et de manière très intime et presque puérile son voyage mental durant cette nuit là, où il pris conscience de la disparition de ses parents et du fait qu’il n’y est en aucun cas responsable. Cette parenthèse qui relève presque de la fiction génère une coupure dans la trame narrative du documentaire, et permet aux spectateur.ices de se comprendre les motivations du réalisateur en faisant ce voyage insensé, tout cela renforce ce sentiment de proximité et de connivence émotionnelle entre celui qui raconte et celles et ceux qui écoutent. 


Le film nous fait passer du rire aux larmes, ne craignant pas de mélanger les genres et de transgresser les normes établies. En combinant les codes du documentaire, du road movie, buddy movie, voyage initiatique, ou encore de la vidéo youtube. Si on ajoute à cela une esthétique très pop, des photos argentiques noir et blanc et en couleur, on obtient un nouveau genre, le style Riverboom.

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