top of page

Saint-Omer: drame, simplicité et compassion

Connue pour ses documentaires, Alice Diop sort son premier long-métrage de fiction en 2022: Saint-Omer. Inspiré de faits réels, le film de procès retrace l’histoire d’une future maman, Rama (jouée par Kayije Kagame) qui assiste au procès d’une femme (interprétée par Guslagie Malanda) accusée d’infanticide. La première question qui nous vient face à un tel drame est évidemment “Comment Laurence a-t-elle pu en arriver là ?”.



"Nous les femmes, nous sommes toutes des chimères"

Au début, c’est bien cette curiosité morbide qui attire les spectateurs vers cette tragédie. Laurence Coly noie sa fille Elise, âgée de 18 mois seulement. Qui aurait envie de voir de telles horreurs dans la réalité ? 

Le cinéma offre cette sécurité de la fiction. Ce n’est pas vrai, ce sont des acteurs. Malgré la (semi) fiction, Saint-Omer nous plonge dans ce fait divers atroce. Sans jamais nous montrer une seule image du crime, celle-ci vient se matérialiser d’elle-même dans notre esprit. Le point de vue du spectateur est rapidement assimilé à celui de Rama. En pleine création de son nouvel ouvrage, elle s’inspire du procès pour son écriture. Rama est comme tout le monde: elle a cet intérêt morbide, glauque du fait divers. Assise dans l’audience, elle assiste à des tours de paroles, tout aussi puissants les uns que les autres. Au fur et à mesure du procès, son visage se décompose. La réalité des faits la rattrape et la confronte à ses propres relations compliquées avec sa mère.


Tout comme ses précédents documentaires, la réalisatrice opte pour une mise en scène simple: de longs plans fixes cadrés à la taille. Pas besoin d’artifice puisque la force du film réside dans l’éloquence des actrices: Guslagie Malanda porte le film à elle seule. Son éloquence est bluffante. Son jeu est neutre et suffit à faire compatir le spectateur, malgré une accusation terrible. Lorsque l’actrice prend la parole, l’audience du procès comme le spectateur, est transporté dans sa vie morose. Le jeu calme et posé des acteurs permet de distinguer le moindre soupçon d’émotion sur leurs visages. Une larme, un début de sourire, des yeux perdus, chaque minuscule détail compte et prend une ampleur bien plus grande que si les acteurs avaient opté pour une performance mouvementée. 


L’une des scènes les plus frappantes du film est lorsque Maître Vaudenay (interprétée par Aurélia Petit) tient un discours face caméra. Brisant presque le 4ème mur, Aurélia Petit nous rappelle l’essentiel: c’est le procès d’un être humain qui souffre en silence. Tapie dans l’ombre, personne ne remarque Laurence, elle cache sa folie au grand jour. Maître Vaudenay questionne également la maternité et le lien unique qui lie à jamais une mère et sa fille (psychologiquement comme biologiquement). En perdant sa fille, Laurence Coly perd un bout d’elle-même. 



Finalement, la question n’est pas de comprendre pourquoi Laurence a agi de cette façon. Personne ne le saura jamais. Ce qui importe réellement est de pouvoir faire preuve de compassion face à un être humain souffrant.


6 vues0 commentaire

Comments


abonnez-vous à la newsletter
pour ne louper aucun post !

see you in theaters !
Audrey Tautou dans "Le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain"
bottom of page