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Nosferatu à Netflix

Qu’est-ce qui se cache sous notre lit ? Se déplace dans les ombres au coin de notre œil ? Fantômes, fées, morts-vivants de tout genre sont invoqués pour combler la peur de l’inconnu. Cet imaginaire, devenue culte par les monstres de Hollywood, prend ses racines dans le folklore et la fascination de celui-ci par des auteurs gothiques tels que Ann Radcliffe, Mary Wollstonecraft Shelly et Bram Stoker avec le monstre le plus mythique, son vampire : Dracula. Dracula, inspiré de la nouvelle Le Vampyre de Polidori, n’a cessé d’être repris et réadapté dans tous les formats possibles. Deux adaptations notables sont la mini-série Dracula et la série animée Castlevania (adaptée du jeu vidéo) sur Netflix, ça change du vampire utilisé comme le super-héros « bad boy » des teen séries.


Dracula avec la voix de Graham McTavish dans Castlevania et Claes Bang dans la mini-série Dracula

Règles du jeu

 

Un des plaisirs de regarder une série ou un film avec un personnage ou un thème emblématique, est de voir comment les créateurs jouent avec le “canon”, c’est-à-dire les règles, les clichés, les attentes préétablies dans la culture générale et l'imaginaire collectif. Par exemple, les vampires ne peuvent pas traverser de l’eau qui coule, ou ne peuvent pas aller au Soleil et manger de l’ail, les Loups-Garous peuvent être tués seulement avec une balle en argent, les fées ne peuvent pas traverser un cercle de sel ou de champignons. Avec quelles règles on joue dans ces versions? Comment sont-elles interprétées?

Ces deux adaptations se distinguent de beaucoup d’autres par leur réussite, justement, d’adapter une histoire, un personnage iconique, de le transformer en gardant les grandes lignes et conserver ce qui le rend si emblématique. La mini-série Dracula, créée par Mark Gatiss et Steven Moffat joue avec le “canon” du roman de Bram Stoker en y étant extrêmement fidèle à certains moments et en divergeant à d’autres. En effet, spoiler, une partie de l’action se passe en 1897 et suit assez bien le roman, les lieux, personnages, dialogues, et sont conformes à l’imaginaire collectif de Dracula établit à travers de nombreux films depuis les années 20. À partir de là, la série évolue par rapport au “canon” et se déplace 123 ans plus tard, en 2020, créant un nouvel espace et de nouveaux personnages pour réinterpréter le personnage et les thèmes de Dracula.

Castlevania joue avec, à la fois la fondation historique du roman de Stoker, et de ses origines dans les jeux vidéos. En effet, contrairement au roman et à la mini-série, Castlevania se déroule en 1431-1476 en Valachie, une région sous control de Vlad III l'Empaleur, qui a donné son nom au personnage de Dracula. Cependant, le roman et la mini-série se déroulent au XIXème siècle en Transylvanie, correspondant à la période d’écriture du roman et non à une vérité historique. De plus, la série est adaptée d’un jeu vidéo qui perdure depuis 1986 avec une trentaine d’itérations. La série s’en inspire et lui rend hommage de part l’animation gore et explicite ainsi que des personnages comme, Sypha, Alucard et Belmont, des lieux, comme la maison des Belmont, et des éléments du monde, comme la magie et les magiciens, qui sont propres au “canon” des jeux. Le jeu étant inspiré du roman et du folklore des vampires, des éléments de ceux-ci s’y retrouve comme le château de Dracula, les vampires qui se transforment en brouillard ou en chauve souris. Justement, la série joue avec tous ces codes, les reconnait et ajoute des choses pour en faire une histoire, un univers, reconnaissable mais nouveau.

 

Dracula, le personnage

 

Dans le roman de Bram Stoker, le point de vue de Dracula et son existence en tant que personnage se fait uniquement à travers le regard des autres personnages, ses antagonistes. Dracula est réduit à une entité maléfique, la cristallisation des plus grands fléaux de l’humanité, c’est tout. Depuis les années 90 et Buffy Contre les Vampires, la tendance est de montrer les vampires comme un mannequin affamé de sang. Il est maléfique mais on fait avec. Ceci se poursuit avec des séries comme Vampires Diaries et des films comme la saga Twilight (faut bien le mentionner quand même). Parmi ces clichés et simplifications adolescentes du monstre, il est plaisant de retrouver une vrai réflexion sur le personnage de Dracula et l’implication du vampirisme par rapport à la condition humaine.

La mini-série se concentre à la fois sur la valeur de la vie face à l’immortalité et l’importance des expériences et sensations humaines à travers la figure de Dracula. Dracula se lamente de ne plus pouvoir voir son grand amour, le Soleil. Il est privé de ce qui donne la vie. Pire, il s’en prive lui-même en croyant à des légendes et de part sa peur de mourir, alors qu’en fait le Soleil n’a aucun effet sur lui. Il cherche à combler le manque de connexion à la vie par le sang. Le fil rouge de la série semble être la phrase « The Blood Is The Life » tire du roman de Bram Stoker. La vie des gens, leur essence, tout leur être est ici concentré dans leur sang et, en le consommant, Dracula adopte les manières et l’essence de ses victimes. Il cultive des gens comme on cultive du vin et en retour se cultive. Son expérience de vie ne se fait qu’a travers celle des autres. Ainsi, Dracula n’est pas la personnification du mal, ni un danger séducteur, mais exprime un trait de l’expérience humaine, le pousse et le symbolise par un acte monstrueux, de boire le sang des autres, pour montrer comment on se nourrit des gens que l’on rencontre, moins littéralement, certes.

Quant à Castelvania, l’exécution du personnage est formidable. N’enlevant rien à son aspect épique et terrifiant, même à l’égard d’autres vampires, Dracula est, spoiler, confronté à une profonde dépression qui est moteur des deux premières saisons. Ses motivations, son point de vue, son expérience sont clairs aux yeux du spectateurs et il existe plus comme un personnage principal que comme un antagoniste. Les implications de l’Église, des autres vampires, de la société autour de la figure de Dracula est aussi détaillée et encrée dans une logique atroce et humaine. Il n’y a pas de mal suprême, le bien et le mal sont nuancés et partout, même chez les protagonistes Trevor Belmont, Sypha et Belnades et Alucard.

 

 

On pourrait parler des heures de Dracula et des vampires qui en découle. Ce monstre historique et emblématique continue de fasciner et de se renouveler et ce n’est pas près de s’arrêter vu que la peur universelle de l’inconnu après la mort et la fascination avec le sang, le tabou continuera à intriguer. D’ailleurs une nouvelle série, Castlevania : Nocturne, un spin-off de Castlevania, vient d’être renouvelé pour une seconde saison sur Netflix. Courrez-y !!!

34 vues1 commentaire

1 Comment


Jasmine
Jasmine
May 25

Super analyse ! J'adore voir l'évolution des personnages mythiques au fil du temps !

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